Dénonciation du solde de tout compte

Qu’est-ce que le solde de tout compte ?

Le solde de tout compte est un document remis au salarié à la fin de son contrat. Il est défini par l’article L1234-20 du Code du travail : « Le solde de tout compte, établi par l’employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l’inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail ». Il est dû au salarié pour tout type de contrat de travail, quel que soit le mode de rupture (démission, licenciement, fin de contrat à durée déterminée…). Il s’accompagne d’un certificat de travail et d’une attestation Pôle Emploi. 

  • Le solde de tout compte contient le total des sommes dues au salarié à la date de fin du contrat, c’est-à-dire le salaire, les primes, les indemnités de rupture de son contrat (indemnité de licenciement, indemnité compensatrice de congés payés…) 
  • Il contient aussi une mention selon laquelle le reçu pour solde de tout compte est établi en double exemplaire (un pour le salarié et un pour l’employeur) selon l’article D 1234-7 du Code du travail. 
  • Le délai de dénonciation du solde de tout compte ne constitue en revanche pas une mention obligatoire (Cass. soc. 4 novembre 2015, n° 14-10.657).

Le Code du travail fixe un délai de 5 ans de conservation par l’employeur des reçus pour solde de tout compte au titre de la protection des données personnelles (article L 3243-4 du code du travail).

Le reçu pour solde de tout compte s’effectue par remise en main propre, le jour du départ physique du salarié de l’entreprise s’il n’y a pas de préavis, ou bien lors de la rupture du contrat de travail s’il y a un préavis. Le solde de tout compte est quérable, ce qui signifie que c’est au salarié de venir le récupérer dans l’entreprise comme pour ses documents sociaux. Rien n’empêche cependant l’employeur d’adresser le reçu par courrier recommandé accompagné des documents sociaux (certificat de travail et attestation pôle emploi). Si le salarié n’en retourne pas un exemplaire, le document sera en revanche privé d’effet libératoire.

Quels sont les effets de la dénonciation du solde de tout compte des sommes mentionnées ?

L’effet libératoire

Le solde de tout compte est un document destiné à protéger l’employeur par son effet libératoire.

Instrument destiné à la sécurisation des ruptures, le législateur a souhaité donner un caractère libératoire au reçu au-delà d’un délai de six mois de sorte que passé le délai de dénonciation, la dette est éteinte. 

Signer le reçu pour solde de tout compte par le salarié est facultatif. Cependant, « pour faire courir le délai de 6 mois à l’expiration duquel le salarié ne peut plus dénoncer le reçu pour solde de tout compte, ce dernier doit comporter la date et sa signature. Il importe peu que cette date ne soit pas écrite de la main du salarié, dès lors qu’elle est certaine » (Cass.Soc., 20 février 2019, n° 17-27.600). 

La signature du solde de tout compte pendant le préavis et alors que le salarié est dispensé de préavis est parfaitement libératoire pour l’employeur sauf si le solde est dénoncé dans le délai de 6 mois.

La dénonciation du solde de tout compte des sommes mentionnées est différente en fonction de l’existence d’une signature du reçu ou non :

  • Si le salarié a signé le reçu, il dispose d’un délai de contestation de 6 mois suivant la date de signature pour dénoncer le solde de tout compte. 

Le reçu pour solde de tout compte est dénoncé par lettre recommandée avec accusé de réception. Il n’est désormais plus exigé que la dénonciation soit motivée.

Cette dénonciation peut aussi intervenir par saisine du Conseil de Prud’hommes pour les chefs de demandes qui y sont mentionnées.

  • Si le salarié ne l’a pas signé, il doit contester le solde de tout compte devant le Conseil des prud’hommes. Les délais de dénonciation varient en fonction des sommes mentionnées sur le reçu. Ils sont de un an si le montant concerne la rupture du contrat, deux ans s’il concerne l’exécution du contrat de travail, et trois ans s’il concerne les salaires.

La dénonciation se faisait auparavant dans un délai de deux mois (Cass. Soc., 1er mars 1989, n°87-41.719). 

La Cour de cassation a précisé en 2018 la nouvelle procédure de dénonciation par saisine du conseil des prud’hommes : « Attendu, cependant, que si la convocation devant le bureau de conciliation produit, quant aux chefs de demande qui y sont énoncés, les effets de la dénonciation visée par l’article L. 1234-20 du code du travail, c’est à la condition qu’elle ait été reçue par l’employeur dans le délai de six mois » (Cass. Soc. 7 mars 2018 n° 16-13194). 

Alors que la Cour de Cassation avait admis quelques années auparavant que la date de notification à retenir était celle de son expédition (Cass. Soc. 16 mai 2000 n° 96-43218). 

Plus particulièrement, concernant des heures supplémentaires, la Cour de cassation est venue clarifier la situation par sa décision du 13 mars 2019 : les heures supplémentaires relèvent du salaire, et suivent donc le même régime que celui-ci (Cass. Soc., 13 mars 2019, n° 17-31.514).

L’annulation de l’effet libératoire

Cependant, il est à noter que l’effet libératoire du solde de tout compte n’est pas systématique :

  • La signature n’induit pas un effet libératoire : le salarié a la possibilité de dénoncer les sommes mentionnées du solde de tout compte durant 6 mois, même s’il l’a signé. (Cass.soc. 18 décembre 2013, n°12-24.985). 
  • La signature pendant le préavis alors que le salarié n’avait pas été dispensé de l’exécution de son préavis n’induit pas non plus un effet libératoire (Cass. Soc. 10 novembre 1998 n°96-43743). 
  • Le solde de tout compte qui fait état d’une somme globale et renvoie pour le détail des sommes versées au salarié au bulletin de paie annexé n’a pas d’effet libératoire (Cass. Soc. 14 fév. 2018 n° 16-16617 ; Cass. Soc. 13 mars 2019, n°17-31.514).
  • Afin de priver le reçu de son effet libératoire, le salarié peut formuler des réserves à côté de sa signature sur le reçu. Cela lui permet de dénoncer le reçu par la suite, en profitant du même régime que la dénonciation des sommes non mentionnées sur le reçu et la dénonciation d’un reçu non signé. (Cass. Soc. 20 nov. 2001 n° 99-44790 ; Cass. Soc. 26 fév. 1985 n° 82-42807). Une signature accompagnée d’une réserve enlève donc la valeur libératoire du reçu. 

Quels sont les effets de la dénonciation du solde de tout compte des sommes non mentionnées ?

Pour préserver les droits des salariés, il a été prévu que l’effet libératoire ne puisse se réaliser que pour les droits et sommes visés dans le reçu pour solde de tout compte, ces derniers restant libres d’élever des contestations relatives à des questions non tranchées par le reçu de solde de tout compte dans les délais de droit commun défini par le Code du travail :

  • L’action en paiement des salaires (rappels de primes, rémunération variable, heures supplémentaires) se prescrit dans un délai de trois ans selon l’article L3245-1 du Code de travail.
  • L’action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit dans un délai de deux ans selon l’article L 1471-1 du Code de travail. 

Ces délais sont aussi valables pour l’employeur s’il souhaite dénoncer son salarié comme bénéficiaire d’un trop-perçu, selon l’article 1302-1 du Code civil.

En cas de refus de signature du fait d’un désaccord du salarié, l’employeur ne peut refuser de régler les sommes dues au salarié. Pour autant afin d’éviter une situation de blocage il est conseillé au salarié de porter sur le reçu la mention « sous réserves » et si l’employeur s’y oppose de le signer sans mention particulière.

Le salarié devra néanmoins adresser sa contestation du solde de tout compte à l’employeur par lettre recommandée dans les 6 mois.

Le salarié doit donc prêter une attention particulière à la signature de son reçu pour son solde de tout compte afin de ne pas éteindre ses droits. 

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